Nuits de paresse: Tableau 4

4.03.2007

Tableau 4

J'ai bien passé une heure devant cette porte. J'étais sur son palier, debout, les jambes bien droites, le dos légèrement courbé, le regard un peu en dessous. Et j'imaginais ce qu'il pouvait bien y avoir derrière elle. J'étais certain au debut, que je n'y trouverai que l'autre palier, la même chose que ce qu'elle me présentait, mais en miroir. Je voyais clairement ma situation si j'avais été de l'autre côté, la poignée non plus à droite, mais à gauche. A un certain moment, cette image inversée est devenue floue, ce n'était plus moi mais quelqu'un d'autre qui était de l'autre côté. Quelqu'un qui avait la même position que moi, mais inversée, la poignée à gauche. Les jambes droites, le dos courbé et le regard en dessous. J'imaginais que nous voyions la même chose, la même porte mais en sachant que de l'autre côté il y avait quelqu'un d'autre. La porte se mit a bouger légèrement, ou plutôt elle ondulait, doucement. Elle changeait de forme, se courbait, laissant un jour au-dessus de la poignée, en haut, à droite. Et de ce jour, me parvenait des sons. Une respiration, une respiration irrégulière, et de légers mouvements, comme des mouvements de fatigue, quand le buste se redresse légèrement, et fait un regard un peu moins en dessous. Jusqu'à ce que le regard aille droit, devant la porte et pour la traverser, juste au-dessus du juda. Je ne pouvais pas rester ainsi des heures à observer cette porte qui ondule et ce juda fermé. Je devais faire quelque chose. Me vint l'idee que peut-être, si j'ouvrais ce juda, je verrais ce qu'il y avait vraiment derrière cette porte, juste un regard, pour savoir enfin, et sortir de cet état de malaise, ces jambes lourdes, ce dos douloureux et ces yeux qui commençaient à loucher. Alors je m'avancai, doucement, un pas, la jambe droite qui se traîne, puis d'un mouvement de hanche rapide, la gauche qui avance, jusqu'à ce que mon pied touche cette porte, juste sous le juda. Et ma main droite, qui soulève lentement le petit loquet du juda, et mon oeil qui s'y pose. Et qui voit mon oeil qui me regarde l'oeil, comme inverse, mon oeil droit regardant mon gauche.

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