Nuits de paresse: 10/03/06

10.03.2006

Violence

Nous avons tous un petit lexique idéologique grâce auquel nous comprenons le monde environnant. Souvent les définitions que nous y trouvons sont floues. Ce sont des maximes, des phrases colportées, des images, rien qui ne puisse en l’état être intégré dans le Larousse. Mais la plupart de ces termes nous sont communs. Violence est un terme « surchargé », le vocabulaire associé y est important, les images multiples, et chacun a son ou ses expériences de la violence. Pour contrarier les effets de cette Violence, il faut organiser des contre-feux, créer des paravents voire monter des murs. Une campagne d’affichage sur le sujet a été lancée récemment, les murs de Paris en sont couverts, son propos est simple : que les victimes parlent des violences qu’elles subissent, dans les établissements scolaires. Sur l’affiche sont notées des mots également surchargés (violence, racket, harcèlement, viol) accompagnés de ce slogan : « La violence si tu te tais elle te tue ». Pour le site (www.jeunesviolencesecoute.fr) la violence est définie comme « tout ce qui porte atteinte à autrui ».

Cette campagne d’information lancée par le L’Île-de-France vers les lycées (la Région est compétente en ce domaine) dure depuis six ans, ses effets ne sont pas évidents. Le récent classement paru dans Le Point des établissements scolaires les plus violents n’apporte aucune donnée fiable car il se base sur une « main courante » des violences déclarées. Les plus « violents » sont ceux qui ont une administration pointilleuse qui répond avec diligence aux soifs statistiques du Ministère. Pas de comparatif dans le temps non plus, ce sont des statistiques statiques qui mêlent heurts sur le parvis de l’établissement, jets de gomme et lacérations sur une année. Tout ce discours (sensibilisation et condamnation) a une fonction à mon sens : limiter la compréhension réelle de la violence scolaire, comparable à celle d’un univers carcéral, comme décrit par Erwin Goffman dans « Asile ». C’est la violence même de l’institution qui est masquée, travestie par un discours calque de celui constitué sur les banlieues. Opposer intérieur/extérieur n’est pas suffisant, l’école est dans la société mais elle a ses propres règles, ses conflits internes institution/étudiants/professeurs, et ses enjeux. Un champ comme un autre et il faut le considérer comme tel. Avec ce bémol que ceux pour qui il fonctionne en sont ses prisonniers.