Nuits de paresse: 10/28/06

10.28.2006

Suspension

A force de dialoguer, on finit par découvrir des choses sur soi-même. Il est bien évident que personne ne passe tout son temps à l’introspection et que pour faire surgir ce que l’on a en soi, il faut créer des occasions ou profiter d’occasions de le faire. Par la lecture, il est également possible de permettre ce surgissement et plus notre goût est « éduqué », plus ces surgissements seront nombreux et riches d’enseignements sur soi. En feuilletant l’un des ouvrages du Dr Gabel, que j’évoquais il y a peu, je suis tombé sur le concept de « suspension. » Bien évidemment avant de pouvoir en saisir toute son importante (si tant est qu’elle en ait), il me faudra beaucoup de temps et de persévérance. Mais à l’instant, il évoque quelques petites choses que je m’empresse de coucher sur le papier (sur l’écran en fait).

Quand je me présente à quelqu’un, je donne une partie de mon état civil, des choses apparentes qui ont, pour partie, formé ma personnalité. Suivant mon état de fatigue j’aurai un certain maintien, mon visage sera plus ou moins détendu, et mes vêtements plus ou moins distendus. Mais c’est bien moi qui suis là-devant. Puis en conversant, je laisserai, plus ou moins consciemment, apparaître certains traits de caractère, certains tics de langage, des mimiques, mon bric-à-brac personnel. Mais beaucoup de choses resteront cachées, dans des recoins, ou sous des dalles. Bref je ne serai moi que d’une certaine façon. Avec le temps et les rencontres, tout ceci prendra de l’épaisseur, les couches se multiplieront et suivant qui est devant moi, surgiront ces petits riens qui sont ce que je suis.

Dans une certaine mesure toutefois car il n’est pas possible de se présenter d’une manière si impeccable. Toujours à la première rencontre, je présenterai en fin de compte qui je suis réellement. C’est dans ce premier moment que je peux évoquer la suspension. Ce n’est pas qu’un soupir, un blanc, un moment fugace, c’est aussi tout cet appareil complexe qui me constitue. C’est tout ce que je pourrais dire si. A la fois la longue théorie des possibles et tout ce que je pense et je suis en fait. Cet instant sera en suspension à chaque nouvelle rencontre, il sera une vapeur en attente de condensation. Ce qui fait la poussière d’une maison condamnée.