Nuits de paresse: 09/26/06

9.26.2006

Indigène - Autochtone

Le mot connaît un regain d’usage. Indigène fourmille dans la presse, en Une, en pages Politique, ou Sociale, ou Culture ; moins en Faits Divers. Quand sont évoquées les populations indigènes, il faut comprendre les populations des anciennes colonies françaises. Le terme indigène n’est pas neutre, il fait référence au sang, à la substance de l’autre, à sa différence indépassable, quand autochtone se limite à la terre. L’indigène était dépossédé de sa terre parce qu’il était substantiellement incapable de la mettre en valeur, il était usurpateur d’une terre qui de droit appartenait au colon, au civilisateur. L’indigène était endémique, maladie du lieu qu’il fallait éradiquer par tous les moyens. Les écrits des théoriciens de la colonisation française sont sur ce point hallucinants, mais rien de neuf sous le soleil, le précédent américain était là.

Durant la « deuxième guerre de trente ans » (George Steiner) de nombreux colonisés ont combattu auprès des indigènes pour libérer les terres irrédentes de métropole et de son Empire avant d’être oubliés. Que les enfants et petits-enfants de cette « armée des ombres » reviennent sur cette période devenait nécessaire, urgent même. Ils rappellent qu’ils sont eux aussi la France, indigènes de ce pays et non pas autochtones de banlieue. Tout ce travail de mémoire sera également fait par ceux qui ont lutté pour qu’elle soit oubliée. En admettant enfin que les fils des colonies sont aussi français, l’histoire officielle redonnera l’espoir, encore socialement et économiquement illusoire, qu’ils ont les mêmes droits que les fils du Berry et de l’Hainaut. Après tout « l’armée de réserve » aura toujours besoin de bras.