Nuits de paresse: 01/10/08

1.10.2008

Libération, 10 janvier 2008

Les sujets d’actualité ne manquent pas. Ça fourmille même. Parthénogenèse ? In vitro ? Quels sont les sujets qui ont un réel intérêt ? A force de suivre l’actualité, je finis par ne plus bien savoir quel sujet est important. Quel fil dois-je suivre pour comprendre le sens de l’histoire ? Toutes ces traces doivent construire une direction, ou alors à quoi bon ? Quand je tente de deviner le vecteur directionnel de cet immense fourbis, je suis comme un parieur jouant à la roulette, j’utilise des séries qui n’ont de logique qu’a posteriori, elles n’ouvrent aucune perspective pour l’avenir, impossible de découvrir avec ces constructions quel sera le prochain numéro. Il n’existe pas de martingale, et en fin de compte toute théorie qui lie hasard et gain débouche inévitablement sur une perte. Des théoriciens de l’Histoire veulent croire que « ça » avance vers quelque chose qui sera toujours positif. Ce que nous appelons le progrès. Que les séries qui s’inscrivent peuvent se définir comme ayant une somme positive.

Evidemment, y’a des processus. Le dépérissement du travail, l’accumulation du capital, le progrès technique, le désenchantement du monde, l’unification de l’Histoire… mais tous ces processus, ces vecteurs historiques, ne sont validés que sur de courtes périodes. Imaginez le monde si le modèle Athénien avait triomphé de l’Histoire ! Il est possible de constituer des futuribles, à partir de processus concurrents, mais aucun de ces futurible ne s’imposera définitivement. Il est possible d’avoir une idée de ce qui va advenir en trouvant les vecteurs les plus dynamiques, et en observant bien ce qui en est train de se passer, il est possible de les définir. Un travail d’enquête passionnant mais qui nécessite plus que la lecture d’un simple quotidien. N’ayant pas les moyens techniques et intellectuels pour un tel travail, je ne peux utiliser qu’une seule méthode : la rêverie.

D’où parfois ces délires autour d’un sujet souvent quelconque. Par exemple, prenons les élections aux Etats-Unis. Je ne sais pas grand-chose sur les Etats-Unis, ses mœurs, son histoire, son organisation politique, mais à force de pratiquer l’actualité américaine, à force de lire des analyse concurrentes sur ce qui s’y passe, à force d’accumuler des informations souvent secondaires et très rarement de première main, il m’est possible d’imaginer une victoire claire et nette des républicains à la prochaine présidentielle. De la partie la plus conservatrice de ce parti. L’opinion publique américaine est travaillée par la peur, l’incertitude de l’avenir, la crainte du dépérissement de son modèle. C’est en plus grand ce qui s’est passé en France. Les Démocrates, comme le Parti Socialiste l’année dernière, sont incapables (pour l’instant, mais rien de vient le contredire) de faire vibrer l’opinion publique américaine. Pourtant le bilan de l’administration Bush fils, comme l’était celui de Chirac, est particulièrement désastreux. Qui fera vibrer l’imagination de l’Amérique majoritaire ?

Il est possible de faire l’analyse inverse. Et avoir raison. Précision importante tout de même, je ne dis pas ça parce que je me serais levé du pied gauche, ou parce qu’il fait gris dehors, mais parce que je ne vois pas comment il pourrait en être autrement. Je n’y échappe pas, encore un pari…