Nuits de paresse: American Gladiators

2.26.2008

American Gladiators

Quand j’étais plus jeune (phrase que j’ai de plus en plus l’occasion de dire ces temps-ci), j’étais fasciné par deux sports : le golf et le catch. Pas grand-chose de commun entre ces deux activités, sauf que je pouvais en suivre des retransmissions sur canal+. Le golf accompagnait avantageusement mes insomnies, quand au catch, c’était plus une activité télévisuelle post-scolaire. Et à force, j’ai fini par me laisser transporter par ces mises en scènes excessives, ces combats sur-joués, et les nombreux effets de manchette qu’occasionnent les affrontements grotesques que proposait, si je ne m’abuse, la télévision canadienne. Et rien que pour l’accent québécois des présentateurs, cela valait le coup. A l’époque la grande star du catch s’appelait Hulk Hogan. Il était impressionnant mais par rapport aux autres catcheurs, il était dans la moyenne. Ce qui le différenciait des autres était son goût prononcé pour la mise en scène, il avait des gimmicks que toute la foule reprenait, il trouvait un second souffle quand tous pensaient qu’il allait perdre, il savait jouer avec les nerfs des spectateurs et puis, il était champion du monde.

Hulk Hogan était déjà depuis longtemps dans le circuit à l’époque. J’ai même du assisté à son dernier match professionnel il me semble. Il y a plus de quinze ans. Ensuite il a joué dans une série qui lui était consacrée. Il a animé des émissions. Un vrai pro de la com’. Cette année, il a repris le chemin des ondes en tant qu’animateur d’un show qui avait un grand succès au moment où il a arrêté sa carrière : American Gladiators. Le pitch… Des américains normaux affrontent des « gladiateurs » surentraînés dans une arène chauffée à blanc, lors d’épreuves souvent hallucinantes. Il y a des éliminatoires, puis deux demi-finales et un « Grand finale », à chaque fois, les concurrents, après avoir passé l’épreuve des gladiateurs, doivent s’affronter lors d’un parcours d’obstacles particulièrement éprouvant. Pour gagner 100 000 dollars, une bagnole et le droit de devenir gladiateurs eux-mêmes. L’éliminateur qu’ils l’appèlent. A chaque fois je m’accrochais à mon siège. C’est tellement bien foutu que je me laissais prendre au jeu. Je vibrais avec ces p’tits gars d’Amérique, qui jetaient toutes leurs forces dans cette dernière bataille. Comme on dit, ils luttaient contre eux-mêmes pour trouver la volonté de finir ces épreuves. Et là, c’est le drame…

Toutes les mises en scène, c’est-à-dire celle de la vie de ces p’tits Américains, les enjeux personnels, la lutte contre les gladiateurs, puis l’épreuve finale, concentrent toute l’attention (focus) du spectateur et de l’acteur sur la puissance de l’individu (puissance de la volonté), sa sortie de son cadre social (déréalisation) et son entrée dans l’ordre des gladiateurs (réification). Et ce processus classique d’aliénation s’achève par la glorification de deux individus qui correspondent exactement au WASP moyen. Une émission fasciste dans ses modalités (l’individu est transcendé lors d’un parcours initiatique et intégré dans une structure de combat) qui en plus a servi lors de son épreuve finale à présenter un film (Vantage Point) dans lequel le Président des Etats-Unis est assassiné par des terroristes. Parce que j’oubliais un élément fondamental, pour entrer dans le Nouvel Ordre il faut dépasser LA peur.

N’ayez crainte, cette émission arrivera certainement en France.

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