Le "spectacle diffus" du volontariat.
Une manière d’imposer sans commander commence à connaître une vogue inquiétante. Jusqu’alors engagement volontaire, elle est devenu, dans l’entreprise notamment, une méthode de management qui permet aux chefs de ne plus imposer mais de susciter. Dans le cadre de politiques publiques, il oblige, sans contrainte, sans violence visible, les citoyens à faire des efforts. Cette idée garde encore un peu de sa force quand il s’agit d’engagement humanitaire ou social, voire politique. Le volontariat est le signe de la démission évidente des responsables, une manière d’imposer par l’intérieur, par la volonté de celui qui fait l’effort, sans signifier la moindre coercition. En motivant le volontariat, il est plus facile de faire croire que la personne qui se porte volontaire le fait librement. Le Lundi de Pentecôte est remis en cause depuis sa création et, à présent qu’il est clairement établi qu’imposer un jour travaillé aux salariés pour financer une branche de la Sécurité Sociale n’est pas efficace, le gouvernement va certainement choisir la voie du volontariat, comme recommandé par le rapport Leonetti. Chaque salarié devra donc « choisir » un jour pendant lequel il travaillera sans être payé. Imposer le volontariat, formule ironique et déjà bien patinée par l’usage, perd de sa distance pour devenir une forme pratique d’aliénation. Combien d’entreprises se réorganisent en proposant un volontariat au départ, ou à la reconversion ? Le salarié qui de toute façon ne retrouvera pas son travail initial doit s’imposer le choix de le modifier.
Par le volontariat, il n’existe plus de responsable désigné, de force visible qui impose ; c’est ce que Guy Debord appelait le « spectacle diffus », aliénation sans visage, toile de fond de la modernité.
Le volontariat est en train de devenir, sous nos yeux, l’outil de coercition par excellence des sociétés pacifiées.
Inscription à :
Publier les commentaires (Atom)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire